Le Sporting Kansas City; un modèle à suivre

Je lis souvent sur les médias sociaux que le seul moyen d’avoir du succès en MLS serait de recruter des stars internationales et/ou d’avoir un stade au centre-ville afin d’attirer la clientèle. Le Sporting Kansas City (SKC) nous démontre depuis plusieurs années qu’il est possible d’en avoir autrement. Contrairement à plusieurs clubs de MLS en vogue qui se renforcent à coup de millions, le SKC continue son petit bonhomme de chemin en recrutant intelligemment à faible coût tout en maintenant une moyenne de spectateurs intéressante (au-dessus de 19500 dans les six dernières années) malgré un stade situé à plus de vingt minutes en voiture du centre-ville. Quelle est la recette magique du club?

La stabilité et le jeu alléchant :

La composante majeure qui explique le succès du Sporting s’appelle Peter Vermes! L’ex-international américain (66 apparitions avec l’équipe nationale) a pleinement réussi sa reconversion. Défenseur intraitable lorsqu’il était joueur, voir son club jouer de manière défensive n’aurait surpris personne. Que nenni! Vermes a instauré un système de jeu extrêmement offensif, souvent en une touche de balle, pour le plus grand plaisir des supporters du club.

Bien évidemment, il a fallu du temps avant que la mayonnaise prenne. À sa première expérience en tant qu’entraineur-chef par intérim au milieu de la saison 2009 (plus précisément le 4 août), Vermes a mené les Wizards de Kansas City (ancien nom du club) vers une fiche peu reluisante de 3V-2N-7D. Malgré tout, les dirigeants des Wizards décident de lui faire confiance en le nommant entraineur-chef à temps plein la saison suivante. La saison 2010 sera du même niveau que la précédente et Vermes ne parvient toujours pas à qualifier son équipe aux séries éliminatoires (11V-6N-13D). C’est à ce moment-là que le club décide de se donner une nouvelle image en changeant de nom pour le Sporting Kansas City. La direction garde tout de même sa confiance en Vermes et bien lui en a pris! Depuis la saison 2011, l’entraineur américain a mené à chaque année le Sporting vers une participation aux séries remportant sur son passage une MLS Cup (2013), trois US Open Cup (2012, 2015 et 2017) et finissant premier de sa conférence à trois reprises (2011 et 2012 dans l’Est et 2018 dans l’Ouest). Vermes est actuellement l’entraineur qui a la plus grande longévité en MLS et c’est tout à son honneur.

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La stratégie marketing :

Afin de construire un stade uniquement dédié au soccer, les dirigeants du Sporting ont choisi un vaste terrain situé loin du centre de la ville. Malgré tout, le Children’s Mercy Park est souvent plein à craquer les jours de matchs! Si une partie de ce support indéfectible est reliée à l’histoire d’un club victorieux (2 MLS Cup, 5 US Open Cup et 1 Supporters’ Shield), la stratégie marketing des dirigeants du club est innovatrice et mérite qu’on s’y attarde.
En tout premier, il est important de mentionner les efforts consentis par les dirigeants afin de se rapprocher des fans et des groupes de supporters (plus d’une dizaine!). C’est dans cette optique que le président du club passe les quinze premières minutes du match dans la section du groupe de supporters appelé ‘The Cauldron’ (le chaudron en français, SITE WEB). Cette proximité du président avec les fans aide grandement à approfondir le sens d’appartenance des supporters présents envers l’institution.

La seconde partie de cette stratégie est celle qui m’intéresse le plus personnellement. Conscients de la distance entre le centre-ville et le stade, les dirigeants ont opté pour une solution assez originale afin d’accroitre leur présence au cœur de la ville; un bar/pub! L’établissement se situe sur la rue Grand Boulevard et offre à ses clients plusieurs divertissements (tennis de table, babyfoot, golf virtuel…) tout en mettant l’accent sur les matchs de l’équipe locale lorsqu’elle joue. Le nom du club est bien mis en valeur à l’extérieur et à l’intérieur du bar afin de créer un engouement certain lors des rencontres du club.

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L’académie :

De nos jours, dans le monde du ballon rond, un club ne peut connaitre le succès sur du long terme sans avoir une académie de haut niveau. Peter Vermes et ses dirigeants l’ont su assez tôt et se sont concentrés à développer leurs jeunes pousses. Le Sporting a signé son premier Homegrown Player (HGP, joueur formé au club) en 2010 en octroyant le premier contrat professionnel de l’histoire du club à Jon Kempin (au Crew de Columbus présentement). Depuis, le club a fait d’énormes progrès dans ce domaine. Si le nombre de HGP n’est pas très élevé, la qualité des joueurs signés est à souligner. Le premier gros coup de l’académie se nomme Erik Palmer-Brown qui passe professionnel en 2013 à l’âge de 16 ans! Recruté par Manchester City en janvier 2018, Palmer-Brown est actuellement prêté au club néerlandais NAC Breda où il a déjà disputé six matchs en tant que titulaire. Ambitieux, le Sporting ne s’arrête pas là et signe le hongrois Daniel Salloi, 20 ans à l’époque, son premier contrat professionnel en janvier 2016. Salloi grimpe les échelons rapidement et gagne une place de titulaire indiscutable dans le onze de Vermes en 2017. Sa production explose en 2018 où il inscrit 14 buts (meilleur buteur du club!) et donne 7 passes décisives.

De plus, Vermes n’a pas hésité à lancer trois autres jeunes joueurs en 2018 pour leurs débuts professionnels; Wan Kuzain Wan Kamal (milieu défensif, 20 ans, 6 matchs), Jaylin Lindsay (latéral droit, 18 ans, 7 matchs et une passe décisive) et Gianluca Busio (milieu central, 16 ans, 7 matchs et un but). Le talent de ces jeunes loups est indéniable et le meilleur reste à venir; le très prometteur Tyler Freeman, 15 ans (!), vient tout juste d’apposer sa signature au bas de son premier contrat professionnel en octobre 2018 signe que l’avenir semble prometteur pour l’académie du Sporting.

Le recrutement adéquat :

La dernière facette que j’aimerais explorer concerne la cellule de recrutement du club. Contrairement aux autres franchises de la MLS qui cherchent le talent en Amérique du Sud, à celles qui cherchent à recruter des stars en fin de carrière ou encore celles qui recrutent de bons joueurs confirmés dans la force de l’âge en Europe, le Sporting Kansas City recrute des joueurs très peu reconnus du continent européen. Je vous avais parlé de l’excellent Preki (lire ART) précédemment recruté de Portsmouth en Angleterre. Malgré le changement de propriétaires, SKC continue de faire ses emplettes de la même façon. Roger Espinoza (recruté de Wigan en Angleterre), Felipe Gutierrez (du Betis Séville en Espagne), Johnny Russell (de Derby County en Angleterre) et les deux produits de la Masia (académie du FC Barcelone en Espagne) Ilie Sanchez et Oriol Rosell ne sont que de brefs exemples de la réussite de la cellule de recrutement qui scrute les talents susceptibles d’apporter un plus à la formation de Vermes. Ce dernier n’est certes pas étranger au succès de ladite cellule avec les acquisitions de deux joueurs du championnat hongrois (Nemeth en 2015 et Barath il y a un peu plus d’un mois). Le recrutement n’est que très rarement remis en question et certains de ces joueurs sont maintenant adulés par les supporters du club.

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Verdict :

Gérée de main de maitre par ses propriétaires, la franchise se développe d’année en année et s’incruste de plus en plus dans les cœurs des habitants de la ‘City of Fountains’ (en français ‘ville des fontaines’, surnom de Kansas City). Constructif, exigeant et organisé, Peter Vermes est l’élément clé du succès du Sporting en MLS et fait partie intégrante du passé, du présent et du futur du club. Tous les ingrédients semblent en place afin que SKC continue à briller dans les années futures. Une MLS Cup sur le court terme? Je serais loin d’être surpris…

Hady Raphaël

Créateur du défunt www.mlsenfolie.com et co-rédacteur en chef de Culture Soccer, je suis un observateur assidu de la MLS et la CanPL. Animateur de plusieurs podcasts sur le soccer nord-américain et consultant à la radio Médias Maghreb à Montréal. Fier partisan et abonné de saison de l'Impact de Montréal

5 thoughts on “Le Sporting Kansas City; un modèle à suivre

  1. Merci Raphael pour ce bel article, j’en ai retenu pas mal de belle facettes de ce club très réaliste. La stabilité, la fraternité entre le président du club et les fans, la formation, le recrutement basé sur l’instinct gagnant des bons recruteurs fait de ce club, en effet, un modèle à suivre.

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