Les Colorado Rapids ont attendu 2020 avec beaucoup, beaucoup d’impatience. Le club de la région de Denver construit, depuis plusieurs saisons, sur cette année lors de laquelle leurs places de joueurs désignés deviennent libres et où le groupe est déjà bien présent, autour d’un entraîneur stable. Revue de l’équipe pour la saison 2020, de leurs dernières prestations et des chantiers encore à venir.

2019 : Trois entraîneurs, trois styles
La saison 2019 a commencé comme l’une des pires de l’histoire des Rapids, franchise historique de la MLS puisque dans la ligue depuis sa création, en 1996. Après une très bonne saison (surprenante surtout) en 2016, les Rapids ont coulé en 2017 avec une onzième place au classement général. Pour la saison 2018, Colorado avait pris la décision d’embaucher Anthony Hudson, ancien sélectionneur du Bahreïn et de la Nouvelle-Zélande, un choix judicieux sur le papier pour redonner un coup de neuf à la franchise. Il est jeune, connaît les Etats-Unis puisqu’il est né à Seattle et a joué en United Soccer League, où il y a aussi débuté sa carrière d’entraîneur. L’idée pour la franchise est de trouver quelqu’un qui pourrait gérer tranquillement les années 2018 et 2019 pour arriver l’esprit tranquille en 2020 : ce sera l’année où de nombreux contrats expireront, dont les coûteux Tim Howard et Shkëlzen Gashi. Le dernier sera même sacrifié lors de l’année 2019 pour libérer une place internationale et quittera le club, même s’il occupa toujours techniquement une place de joueur désigné pour 2019.
Seulement, le bilan d’Hudson ne sera pas glorieux avec une onzième place en 2018 et tout aussi malheureux en 2019 : il ne gagnera pas un seul match durant les neuf premières rencontres de la saison et sera rapidement remercié par les Rapids, en mai. L’ancien sélectionneur n’avait vraiment plus la confiance du groupe, qu’il avait décrit au passage comme un « groupe de joueurs moyens » …
Le plan Hudson terminé, Conor Casey commença comme entraîneur intérimaire (malgré une citation connue de l’ancien international américain qui admit ne pas particulièrement aimer regarder du soccer en général). Il remit de l’espoir dans la saison des Rapids malgré, certes, seulement une fiche de 7 victoires en 19 matchs, mais surtout un style de jeu plus offensif, fou même, qui contente les attaquants mais frustre les défenseurs.
Finalement, après des mois de recherche, les Colorado Rapids annoncent en août 2019 avoir engagé Robin Fraser. L’ancien international américain était cité depuis plusieurs années comme l’adjoint qui obtiendrait le plus probablement un contrat dans le futur, puisqu’il était sur les bancs des New York Red Bulls et du Toronto FC entre 2013 et 2019. Son unique expérience à la tête d’une équipe restait cependant frustrante, à la tête du défunt Chivas USA, mais c’était dans une franchise hautement instable.
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Robin Fraser apportera une dimension tactique au football offensif de Conor Casey (le gardant d’ailleurs comme adjoint) et, lors de ses sept matchs à la tête des Rapids, la franchise obtiendra trois blanchissage (clean sheets), soit autant que lors des 27 rencontres précédentes. Encore plus fou, il a gardé l’équipe dans la course aux playoffs jusqu’à la dernière journée malgré son départ catastrophique, avec cinq victoires sur les sept derniers matchs (et certaines contre Seattle, le Galaxy, les Red Bulls et Dallas, tous finalement qualifiés en playoffs). L’espoir est donc présent pour cette année 2020, surtout que les derniers mercatos ont amené de nombreux jeunes talents au club et que le centre de formation produit de belles pépites.

Un groupe de joueurs moyens ?
Quand Anthony Hudson a qualifié son équipe de joueurs moyens, de nombreux analystes de la Major League Soccer ont vocalement défendu son effectif, certes incomplet, mais pas dénué de talent. La preuve, Conor Casey et Robin Fraser en ont fait une équipe capable de battre les plus grosses équipes.
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Sous le feu des critiques ces dernières années, Tim Howard a été plutôt bon dans les buts de Colorado pour sa toute dernière saison, le capitaine des Rapids sauvant son équipe à plusieurs reprises. En défense, Lalas Abubakar aura réalisé une très bonne cuvée 2019, alors qu’il était prêté par le Columbus Crew. Bobby Warshaw, journaliste pour la MLS et ancien joueur que nous avions interviewé ici, l’a placé troisième au classement des meilleurs défenseurs centraux de l’année et sans lui, les Rapids encaissaient 2.42 buts par match (contre 1.55 lorsqu’il était sur la pelouse). La bonne nouvelle de fin d’année, c’est que les Rapids lui ont fait signer un contrat pour de bon (ce qu’il voulait faire de base) pour 400.000$ d’argent d’allocation et une place internationale. Un prix assez cher mais logique, le joueur connaissant déjà le club, il n’aura pas de problème d’adaptation. A ses côtés, les Rapids ont aussi investi cet hiver dans un jeune prometteur, Auston Trusty. Déjà appelé en sélection américaine, Trusty a signé un contrat longue durée (sans qu’on en connaisse les détails) pour 600.000$ d’argent d’allocation, avec 150.000 en potentiel bonus et un pourcentage dans la revente. Évoluant auparavant au Philadelphia Union, il avait réalisé une saison 2018 de haut vol avant de doucement perdre sa place en 2019. A 21 ans, la marge de progression est encore grande et pour Padraig Smith, le directeur sportif des Rapids, la paire Abubakar-Trusty pourrait être celle qui formera la charnière centrale de la défense des Rapids pour les cinq prochaines années.
Ils seront notamment épaulés par Kortne Ford, qui est revenu de blessure en 2019, et une autre recrue, Drew Moor. A 35 ans, le défenseur expérimenté revient de quatre saisons à Toronto, dont deux comme titulaire, où il a notamment remporté la MLS Cup. Moor connaît les Rapids, il a joué sous Fraser à Toronto et était capitaine de Colorado lors leur titre en 2010. Sur les côtés, les titulaires de fin de saison 2019 devraient le rester. Keegan Rosenberry, précieux en 2019 et serein depuis son arrivée en provenance de Philadelphie, est un titulaire assuré. De l’autre côté, Sam Vines s’est petit à petit installé dans le onze partant, si bien que le jeune de 20 ans a été nommé à la 22ème place du classement « 22 Under 22 » (les 22 de moins de 22 ans) de la MLS et a été appelé par Greg Berhalter en sélection nationale ce mois-ci. Il a été formé au club, tout comme Sebastian Anderson qui pourrait être une future vedette du club. Avec sept titularisations en 2019, à seulement 17 ans, le jeune américain était à la Coupe du Monde U17 cet hiver et a montré qu’il avait les qualités pour débuter en MLS.

Le milieu de terrain est aussi tout trouvé pour la saison 2020. Trois éléments se disputent les places : Jack Price, Cole Bassett et Kellyn Acosta. Le premier est le seul qui aura été consistant en 2018 et en 2019, malgré les changements d’entraîneur, et il aura montré toute l’étendue de son talent cette année (comme mentionné dans les bonnes surprises de 2019 sur Culture Soccer). Positionné en numéro 6 ou dans un duo de milieux récupérateurs, il aura été précieux sur coups de pied arrêtés avec 10 passes décisives en 2019, un record dans la ligue, pour une équipe qui aura marqué à 19 reprises de cette manière. A côté de lui, deux joueurs talentueux se disputent des minutes : Cole Bassett, 18 ans, devrait gagner du temps de jeu sur l’année 2020, lui qui était 20ème du 22 Under 22. C’est un des nombreux jeunes talents de l’effectif, lui qui a marqué à trois reprises l’année dernière et qui s’entraîne actuellement avec les U23 d’Arsenal, profitant du lien entre le club anglais et les Rapids, qui ont le même propriétaire. Enfin, le dernier, Kellyn Acosta, est un cas particulier. L’américain, souvent appelé en sélection par Greg Berhalter dont il est l’un des chouchous, est versatile et capable de jouer en numéro 6, 8, 10 ou sur une aile et il se dispute les minutes avec Bassett mais aussi avec d’autres éléments devant. Son plus gros souci reste son irrégularité, autant en sélection qu’en MLS. A 24 ans, il est arrivé l’été dernier du FC Dallas, où il a toujours été un diamant brut, souvent cité pour un probable départ en Europe mais de nombreux doutes subsistent encore sur sa capacité à enchaîner les bonnes performances.
Devant lui se trouve une ligne de trois joueurs talentueux, là aussi avec de nombreux jeunes. Diego Rubio occupe normalement de la position de meneur de jeu, où il a passé l’une des meilleures saisons de sa vie avec 11 buts en 2019. Sur les ailes, Jonathan Lewis est un autre jeune pour lequel Colorado a sorti le chéquier en 2019 : à 22 ans, il a coûté la coquette somme de 700.000$ pour l’acquérir en provenance du New York City FC. L’international américain alterne les matchs avec Sam Nicholson et surtout, Andre Shinyashiki. Ce dernier, brésilien de naissance, qui est arrivé aux États-Unis à un très jeune âge, est naturalisé américain et peut jouer sur une aile ou en numéro 9. Shinyashiki est surtout un jeune joueur, acquis en Superdraft 2019, qui aura impressionné cette année, au point de remporter le titre de Rookie of the Year. Avec 7 buts en 31 rencontres (souvent jouées sur l’aile et en seulement 18 titularisations), il a une marge de progression énorme à seulement 22 ans et devrait être un titulaire régulier en 2020, sur l’aile, avant de possiblement voler la place d’attaquant de pointe à Kei Kamara. A 35 ans, l’attaquant a décidé de renoncer à la sélection du Sierra Leone pour se consacrer à son club et a inscrit 14 buts en 2019, sans être un titulaire indiscutable. Athlétique, il combine extrêmement bien avec les ailiers rapides comme Lewis ou Shinyashiki et devrait garder sa place pour la majorité de l’année 2020.
Les potentiels renforts
L’enthousiasme est donc énorme pour les Rapids en 2020, comme l’année parfaite où les investissements des saisons précédentes se concrétisent. L’équipe décrite plus haut est talentueuse, avec une colonne vertébrale formée de jeunes pépites : Lewis, Acosta, Rosenberry, Shinyashiki, Trusty, Abubakar ou même Rubio, appuyée par des joueurs formés au club comme Bassett, Vines et Anderson, le tout avec quelques vétérans (Price, Kamara).
Cependant, comme mentionné auparavant, le club a attendu cette année 2020 pour enfin pouvoir sortir le chéquier sur de gros noms, libéré des poids financiers qu’étaient Howard et Gashi. Au niveau du gardien de but, rien n’est décidé entre Andre Rawls et Clint Irwin. Le premier a sorti une saison convaincante avec la réserve en USL et a prolongé cette année tandis que le deuxième a déjà été titulaire à ce poste en MLS il y a quelques saisons. Néanmoins, dépenser de l’argent d’allocation pour un gardien expérimenté pour les trois à quatre prochaines saisons pourrait être un transfert intelligent, afin de garder la charnière défensive pleine de jeunesse sous un œil plus vétéran. Minnesota, par exemple, a fait une signature bien sentie avec Vito Mannone en 2019 et un profil similaire pourrait marcher à Colorado.
Pour ce qui est des joueurs désignés, plusieurs options sont à l’étude selon le directeur sportif Padraig Smith. Les trois places ne seront pas comblées, seulement deux, dont une pendant l’hiver selon lui, qui a passé quelques semaines en Amérique du Sud à la recherche de la perle rare. Ce serait plus un ailier rapide, qui pourrait combiner avec Kamara et Rubio et concurrencer Nicholson, Shinyashiki et Lewis. Pour la deuxième place, ne soyez pas étonnés de voir un numéro 9 arriver pour remplacer petit à petit Kei Kamara (pourquoi pas cet été), ou un numéro 6 pour relâcher un peu la pression défensive qui pèse sur les épaules de Jack Price.
Finalement, au moment même où nous préparions à publier cet article, une bonne nouvelle s’est ajoutée à l’effectif déjà bien rempli des Rapids. Il semblerait que Robin Fraser ait décidé d’ajouter de la qualité à son attaque en acquérant un joueur qu’il a entraîné à Toronto, le français Nicolas Benezet. Très dangereux avec Toronto en fin de saison dernière, le joueur de Guingamps a été acheté au club de Ligue 2 pour 500.000$, avec également 50.000$ d’argent d’allocation pour ses droits à Toronto et 50.000$ en bonus, suivant ses performances. Il n’arrive pas en tant que joueur désigné, mais il pourrait être la signature si désirée d’un ailier expérimenté pour épauler la jeunesse des Rapids et pourrait peut-être permettre à Shinyashiki de jouer plus en pointe et moins sur un côté.
Voilà donc à quoi pourrait ressembler les Rapids en 2020, puisque Robin Fraser a exprimé son souhait de jouer en 4-3-3 (en attendant des possibles recrues additionnelles):
Après trois saisons catastrophiques, la saison 2020 des Colorado Rapids s’annonce finalement sous des meilleurs auspices. En 2018, puis en 2019, le club a su faire de bons investissements sur la jeunesse et d’autres devraient arriver en 2020. Les affluences semblent revenir petit à petit à la normale, après une année ou même le stade semblait maudit (voir le tweet ci-dessous), et nous pourrions enfin voir les Rapids en playoffs. Reste à Robin Fraser de choisir les bons éléments et à conjuguer efficacement la folie offensive et les bons éléments défensifs.
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