[Guide] NISA 2020

Malgré les tempêtes et les imprévus, la North Independant Soccer Association (NISA) est de retour pour l’année 2020. Après une saison 2019 inaugurale appelée « showcase », pour justifier tous ces manquements, la NISA revient avec de nouvelles franchises populaires et sans certaines qui manquaient d’ambition ou de talent. Bienvenue dans la plus rock’n’roll des ligues nord-américaines.

Qu’est-ce que la NISA et pourquoi est-elle si spéciale ?

Pour un article plus spécifique sur la genèse de la ligue, nous vous renvoyons à notre papier du début de la première saison, en 2019. Pour résumer rapidement ses débuts, la NISA est, au départ, un projet très instable de ligue avec uniquement des nouvelles franchises. Toutefois, après quelques mois à chercher de nouveaux projets, il fut rapidement décidé qu’intégrer de nouvelles franchises déjà existantes, et qui n’ont donc pas besoin de dépenser ni du temps ni de l’argent dans des installations, était plus efficace et garant d’un soutien populaire.

De plus, de nombreuses franchises étaient tombées dans un « trou » du soccer nord-américain. En effet, entre un statut amateur où les saisons ne durent qu’une poignée de mois (en NPSL – National Premier Soccer League) par exemple, le quatrième échelon du soccer aux États-Unis) et la professionnalisation de la Major League Soccer (MLS), l’United Soccer League (USL) est le seul chemin possible. L’USL possède une D2 et une D3, nommées Championship et League One, qui grandissent chaque année. Cependant, les ligues privées fonctionnent d’une certaine manière : il est impossible pour une équipe présente dans un marché où il existe déjà une équipe d’USL d’intégrer la ligue et il faut, de toute manière, payer un prix élevé pour y entrer. Un accès en MLS coûte plus de 300 millions de dollars, pour celui vers l’USL Championship c’est 10 millions et, pour rejoindre l’USL League One, il faut débourser 1 million.

Lire Aussi : Jusqu’où ira la Fulgurante Ascension de la USL ?

La NISA a donc comme projet, comme l’indique son slogan, de « Redéfinir le Soccer aux Etats-Unis ». Ce n’est pas une ligue privée mais une association et l’entrée est gratuite pour les franchises. Il n’y a pas, non plus, de droits territoriaux et plusieurs franchises peuvent cohabiter dans une même région. La ligue appartient légalement à ses clubs, qui décident ensemble des nouvelles expansions.
C’est une ligue de troisième division, statut qu’elle partage également avec l’USL League One.

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Pourtant sur le site de la NISA, cette carte est… fausse. Le Fury de Philadelphie a abandonné sa place l’année passée et Atlanta ne reviendra pas en 2020, tandis que Providence et Connecticut ne sont pas confirmés (via NISA)

Déroulement de la Saison

Les huit participants pour la saison 2020 sont les suivants : LA Force, Oakland Roots, Detroit City FC, Stumptown Athletic, San Diego 1904 FC, Chattanooga FC, Cal United Strikers FC et Michigan Stars FC.
Par rapport à la saison 2019, la NISA a perdu trois clubs. Le premier à tomber, le Philadelphie Fury, est parti pendant la saison, puisqu’il n’arrivait plus à payer ses joueurs. Un bel exemple de l’instabilité de certaines franchises à ce niveau du soccer nord-américain. Le deuxième, Atlanta SC, qui n’avait même pas de site Internet devait revenir pour la saison 2020 (ils organisaient même des essais au début de l’année) mais n’a finalement pas été intégré au calendrier de la ligue, sans que le public n’ait d’explication. Si ces deux franchises ne sont pas d’énormes pertes pour la ligue, la troisième l’est bien plus. Il s’agit du Miami FC, franchise phare des divisions inférieures, qui a notamment été entraîné par Alessandro Nesta, en 2017. Ces derniers sont partis vers l’USL, en quête de stabilité, et sont une perte conséquente pour la NISA car ils étaient reconnus dans leur ville mais aussi dans le paysage du soccer nord-américain en général.

La saison 2020 est divisée en deux parties, une saison de printemps et une d’automne. Pour la première, l’idée est d’avoir 56 matchs pendant 16 semaines de compétition – si aucun club n’abandonne en cours de route. Elle débutera le 28 février et finira le 13 juin, le tout diffusé gratuitement sur le service MyCujoo, dont nous vous parlions ici. La deuxième, en automne, pourrait être plus longue, puisque le New York Cosmos entrera dans la ligue et des rumeurs d’une seconde expansion, au Connecticut cette fois-ci, circulent aussi. Trois autres clubs sont également en discussions pour entrer dans une éventuelle saison 2021, l’Astoria Knights FC et le New Amsterdam FC, tous deux dans le marché de New-York, ainsi que les Palm Beach Breakers en Floride.

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Le Calendrier de la saison de Printemps (via NISA)

Notons aussi que tous les clubs en lice pour la saison de printemps sont inscrits pour l’US Open Cup, la coupe nationale aux États-Unis, certains contres des clubs d’USL et d’autres contre des équipes de niveaux inférieurs :

Charlotte Independence (USLC) vs. Stumptown Athletic (NISA)
Memphis 901 FC (USLC) vs. Chattanooga FC (NISA)
Indy Eleven (USLC) vs. Michigan Stars FC (NISA)
Detroit City FC (NISA) vs. El Paso Locomotive FC (USLC)
LA Force (NISA) vs. San Diego Loyal SC (USLC)
Sacramento Republic FC (USLC) vs. Oakland Roots (NISA)
Orange County SC (USLC) vs. California United Strikers FC (NISA)
San Diego 1904 FC (NISA) vs.vainqueur d’ASC San Diego (NPSL)/Chula Vista FC (Calif.)

Présentation des Equipes

Avant l’arrivée du New York Cosmos en automne, la ligue possède pour le moment trois énormes clubs qui attirent à eux seuls tous les projecteurs. Sur le terrain, les résultats pourraient être plus compliqués à obtenir comparés à d’autres équipes plus modestes mais plus préparées sportivement. La présentation, suivante, des huit équipes se concentre plus sur l’aspect extra-sportif des clubs puisque la plupart d’entre eux n’ont pas encore annoncé leur effectif.

A l’Ouest, sans doute le côté de la carte avec le plus d’équipes compétitives (malgré la suppression des conférences pour la saison 2020), le gros morceau reste Oakland Roots. Le club est une réelle sensation marketing grâce à son logo réussi, ses liens puissants avec la communauté et son image urbaine. Les fans ont répondu présent lors de la première année et l’affluence moyenne était d’environ 5 000 supporters par match, avec un record de 5 700 personnes en tribunes lors de leur dernier match de la saison face au LA Force. Des chiffres impressionnants en troisième division américaine qui montrent le succès d’une équipe qui avait tout pour plaire, comme les propriétaires nous l’avaient détaillé en interview. En revanche, sur le terrain, les choses sont bien plus complexes et les Roots n’ont récolté que 3 petits points (trois matchs nuls) en 6 matchs. L’entraîneur, Paul Bravo, a été remplacé suite à ces mauvais résultats et c’est Jordan Ferrell, son assistant, qui mènera l’équipe en 2020. Pour la saison qui s’annonce, Oakland a gardé son duo offensif puisque le renard des surfaces, et ancien joueur de Montréal et Columbus en MLS, Jack McInerney a prolongé, tout comme Benji Joya, le numéro 10 de cette équipe qui est excellent techniquement. Ils ont aussi recruté des nouveaux joueurs, notamment en USL. Deux noms sortent du lot dans les arrivés de cet hiver : tout d’abord, Nana Attakora, défenseur central de l’Ottawa Fury, champion de NASL (North American Soccer League) avec le San Francisco Delta en 2017 et international canadien, mais aussi Tristan Bowen. Ce dernier, premier joueur dans l’histoire de la MLS à avoir signé un contrat professionnel en sortant d’une académie, a joué au LA Galaxy et au Chivas USA et tentera de se relancer dans la Bay Area.

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Les Fans de Detroit et leur Fameuse Bannière “FCK MLS” (Via Detroit Metro Time)

Les deux autres gros morceaux sont, eux, des clubs d’expansion pour la saison 2020. Le Detroit City FC est forcément un nom familier si vous connaissez bien le soccer américain puisqu’il est synonyme de chants, de (beaucoup de) fumigènes et de bandereaux politiques dans le stade. Ce club populaire a été fondé en 2012 par cinq amis qui cherchaient à jouer au soccer à Détroit. Depuis, il bat tous les records et parvient, malgré son statut amateur, à organiser des matchs amicaux contre des adversaires internationaux : le FC St. Pauli, club allemand ouvertement antifasciste avec lequel il s’identifie, le Frosinone Calcio (Italie), le Club Nexaca ou encore l’Atlas FC (tous deux basés au Mexique). Le DCFC acceuille allégrement une moyenne de 5 000 supporters (le record est de 7 800 pour le moment) et les tribunes sont un spectacle à elles toutes seules, comme nous vous le détaillions plus tôt en 2019. Cependant, si le club était une réussite en NPSL, la division semi-amateur où il jouait, le passage à un statut professionnel ne devrait pas être facile. De nombreux joueurs de l’effectif des saisons passées sont de retour mais peu d’entre-eux ont un pédigrée impressionnant, excepté Evans Frimpong qui a joué en NASL et Kevin Venegas, ancien joueur de Minnesota et des New-York Cosmos.

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Via Chattanooga FC

C’est le même souci qui frappe Chattanooga FC, la troisième puissance populaire de NISA. Le club a peu de talent sur le papier, si ce n’est le défenseur Richard Nixon qui arrive des Red Wolves, les rivaux locaux (nous avons d’ailleurs parlé de la rivalité dans la ville ici même). Le groupe est surtout constitué de joueurs moyens d’USL Championship ou de League One, ainsi que de solides joueurs qui ont fait leurs marques en quatrième division. Mais, tout comme pour Détroit, le spectacle sera là aussi dans les tribunes.
Chattanooga FC est, en effet, le recordman en termes d’affluence pour la quatrième division aux États-Unis : en 2015, ils étaient plus de 18 000 supporters en tribune pour assister à un match face à la réserve du Cosmos. Depuis, ils dépassent les 10 000 fans de temps à autre, notamment lors des matchs à fort enjeu, et nul doute que les fans devraient continuer à affluer en NISA. Le club est aussi connu pour avoir vendu son capital à ses fans pour lever de l’argent en financement participatif, une première dans l’histoire du sport. 700 000 $ ont ainsi été récoltés de partout dans le monde et le club appartient dorénavant entièrement à ses supporters.

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Le Stade des California United Strickers (via NISA)

Derrières les trois gros noms, il y a aussi des projets peut-être plus stables, du moins sur le papier. Un club basé à Irvine, non loin de Los Angeles, possède un stade de 5 000 places et une académie reconnue. Sans avoir de gros noms dans l’effectif, les California United Strikers pourraient jouer le haut du tableau cette saison grâce à un groupe qui se connaît, ayant joué ensemble dans les divisions inférieures, et qui leur avait permis de gagner le titre de la Conférence Ouest en 2019. L’ambiance autour du stade est familiale, dans une enceinte de très bonne qualité, et le club de Bronwyn Capriotti, une des rares femmes propriétaires d’un club de soccer aux Etats-Unis, part favori pour la saison 2020. Le club veut se baser sur la formation des jeunes et a très récemment signé, par exemple, Shane Kaemerle, un espoir de 15 ans seulement.

Dans la même région, le LA Force, finaliste de cette même Conférence Ouest, est aussi dans les clubs attendus au niveau sportif. Les foules ne sont malheureusement pas à la hauteur de celles d’autres clubs en North Independant Soccer Association, avec parfois moins de 1 000 fans par rencontre, mais le marché est extrêmement compétitif avec, notamment, le Galaxy et le LAFC (évoluant tous deux en MLS) dans le voisinage. Le LA Force tente pourtant de se démarquer sportivement et a réussi à assembler un bon groupe de joueurs de divisions inférieures, là encore sans réelle tête d’affiche.

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Via Soccer Today

Un autre club qu’il faudra vraiment observer cette saison c’est le San Diego 1904 FC, fondé par un groupe d’investisseurs européens comprenant entre autres, Demba Ba et Eden Hazard. Le « Nineteen O’Four » est pourvu en talents techniques et en petits gabarits et se concentre sur la formation des jeunes, comme nous l’a confirmé son entraîneur français Alex Gontran, dans un entretien à paraître. Le club évoluait dans un stade gigantesque de 70 000 places l’année passée, bien trop grand et bien trop cher, et passera du grandiose au convivial pour 2020. En effet, ils joueront dans le stade du Laney High School, un lycée de San Diego, avec une capacité de 3 700 places, un peu à la manière des Oaklands Roots.

Plus au Nord, et surtout plus à l’Est, se trouve le dernier finaliste de la Conférence (finalement gagnée par le Miami FC, depuis parti en USL). Stumptown Athletic est situé en banlieue de Charlotte et a eu du mal, lors de cette première année, à avoir une fanbase régulièrement en tribunes malgré le potentiel de la région, qui ne possède qu’une équipe en USL. Sur le terrain, cependant, elle a réussi à aligner une équipe de remplaçants de League One et de bons joueurs de divisions inférieures, on peut l’attendre dans les meilleures équipes de l’année.

Les derniers en lice, les Michigan Stars, sont la grosse inconnue de l’année. L’équipe est basée non-loin de Détroit et souffre énormément de la comparaison avec le DCFC et ses milliers de fans. L’année passée, les Stars jouaient dans un complexe   intérieur, sans fans. Cette année, ils essaient de lancer une campagne publicitaire et de se faire connaître dans la région mais il semble très compliqué qu’ils y arrivent soudainement. Au moins, ils joueront dans un stade en extérieur pour la saison 2020.

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Un match entre California United Strickers et Oakland Roots (via Soccer Today)

L’année 2020 sera primordiale pour la North Independant Soccer Association. La ligue joue gros avec l’arrivée de clubs populaires, comme Detroit, Chattanooga et le Cosmos, qui devraient apporter de l’attention médiatique dans tout le pays. Malheureusement, elle ne peut pas baser tous ses espoirs sur ces têtes d’affiche et les clubs les plus à la traîne vont devoir travailler pour augmenter les standards de la ligue. Alex Gontran nous le disait, lors de notre podcast, la ligue a énormément de candidats qui sont prêts à faire les investissements nécessaires pour entrer en NISA dès 2021. Cependant, les plus grosses têtes d’affiche pourraient être tentées par un exil en USL, comme l’a fait le Miami FC en fin de saison dernière. Il faudra que la ligue se professionnalise, gagne en sérieux et soit capable d’éviter une fuite des talents pour continuer sur une belle lancée. Non seulement sur le plan sportif, mais aussi sur celui du marketing. Certains sites Internet (comme celui du LA Force) sont quasiment vides tandis que d’autres sont aussi professionnels que ceux des grands clubs européens. Certains clubs peinent à publier quoi que ce soit sur les réseaux sociaux ou, encore, n’ont pas de boutique en ligne. Copier le modèle de franchises comme Oakland, Detroit ou San Diego, qui ont réellement réussi à tisser un lien avec la communauté grâce au sport, mais aussi à des événements toute l’année, des lignes de vêtements reconnaissables et des apparitions lors de manifestations culturelles demande du temps et de l’argent, mais c’est essentiel.
L’année 2021 est primordiale pour cela et pourrait, en cas de succès, redéfinir l’ensemble du soccer américain.

NISA Stadium
Les stades de la ligue, même si les Michigan Stars devraient ne pas jouer en intérieur cette année (via Bulging-Stallion sur Reddit)
Antoine Latran

Co-créateur de Culture Soccer. Ancien rédacteur Soccer Nord-Américain pour Lucarne Opposée. Fan de MLS depuis une balade dans Seattle un jour de match, j'écris sur Culture Soccer sur la MLS, la NISA, la sélection américaine, ainsi que sur des sujets mêlant le sport à la culture, la politique et l'économie.

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